Alchimie
- Le 04/03/2011
- Dans Alchimie & Médecines naturelles
Alchimie
Sur le site d'un bouilleur ambulant, une partie consacrée à l'alchimie peut surprendre… Je dois donc donner quelques explications sur le sens qu'a cette partie importante de mon activité - activité personnelle plus que professionnelle je dois dire.
Qu'est-ce que l'alchimie ?
C'est d'abord une passion qui vous prend pour ne plus vous lâcher, et qui vous pousse à chercher l'endroit où se cache la vie dans la matière. En tant qu'alchimiste, je suis un peu comme un enfant qui regarderait un ours en peluche animé par un ressort et qui voudrait l'ouvrir pour voir comment ça marche.
Cet émerveillement de l'enfant devant son ours à ressort en peluche qui remue la tête, c'est le même que je ressens lorsque j'observe le glou-glou produit par la fermentation des fruits dans le tonneau, le même encore lorsque l'eau-de-vie, ou l'hydrolat, se met à couler de l'alambic, le même toujours quand je coule un régule d'antimoine ou que je calcine mes sels de rose au soleil…
L'alchimie est donc pour moi une tentative ludique de répondre à la question "Comment ça marche ?" ou encore "Qu'est-ce qu'il y a dedans ?"
C'est, dit la tradition, un jeu d'enfant.
Quel rapport y a t-il entre mon activité de distillateur et celle d'alchimiste ?
Et bien, on doit aux alchimistes la moitié de la tradition qui a développé notre eau-de-vie, alchimistes arabes en particulier qui ont développé l'art de la distillation parallèlement à celui de la médecine. Dans le Sud de la France et en Catalogne, Arnaud de Villeneuve et Raymond Lulles ont été leurs ambassadeurs dans la chrétienté à qui l'on doit les termes d'eau-de-vie et d'esprit de vin -l'autre moitié de cette tradition des spiritueux étant le fruit du christianisme particulier à Saint Patrick, inventeur d'une Eau Bénite appelée par lui en gaélique Whisky Beata, c'est lui qui a introduit l'usage de l'alcool consacré comme boisson, la transubstantiation étant d'ailleurs une forme d'alchimie.
Je me suis initié à l'art de la distillation par la fabrication de teintures-mères spagyriques et phytothérapeutiques au sein d'une association d'alchimistes dirigée par Jean Dubuis : Les Philosophes de la Nature.
L'alchimie est-elle un art difficile et obscur ?
La tradition l'a fait, ou l'a rendu, ainsi. Cette obscurité hermétique n'est pas le fait de la nature même de cette science, mais de la complexité de l'humanité : croyances religieuses, jeux de pouvoirs, complexes d'infériorité ou de supériorité (égo) ont compliqué et occulté la pratique de l'alchimie. Dans la réalité, il ne me semble pas qu'être alchimiste soit plus difficile qu'être musicien, ou bouilleur de cru : c'est une question d'engagement personnel : on excelle là ou l'on s'engage tout entier. Il n'est pas non plus impossible d'être un amateur dans cette discipline, ce qui peut aussi donner de grandes joies et être très utile pour son hygiène de vie (les préparations alchimiques sont d'abord des médecines pour la santé).
Sur quoi travaille l'alchimiste ?
La matière première sur laquelle travaille l'alchimiste est la vie, ou l'origine de la vie. Cela se trouve en observant (en admirant devrais-je dire) la nature. Pour moi, la vie est dispensée par le soleil. J'ai appris de Stéphane Barillet l'utilisation de l'énergie solaire en alchimie (ainsi que l'aisance de vivre l'alchimie d'une façon naturelle, décomplexée, désoccultée).
Ensuite, les matières utilisées (j'emploie maintenant le terme de matière au sens propre) sont celles qui vont avoir un sens au travail particulier de chacun :
Les végétaux d'abord, pour la facilité à en faire des médecines, et parce qu'il est simple de comprendre leur composition (en les décomposant en leur principes). Parce que le monde végétal est généreux, et parce que les végétaux sont capable de réaliser la photosynthèse, c'est-à-dire de transformer la lumière solaire en sucre, ce qui n'est pas rien dans l'aventure de la vie… L'alchimie végétale est à l'origine directe ou indirecte de bien des médecines naturelles comme la spagyrie, l'homéopathie ou les élixirs floraux du Dr. Bach (voyez mon livre l'Alambic - l'Art de la Distillation - Alcools, Parfums, Médecines).
Le monde animal est aussi plein de ressources pour l'alchimiste : tout d'abord, les produits de la ruche (miel, cire, propolis), les œufs, qui donnent une belle teinture, et puis d'autres produits nettement moins appétissants comme les poissons ou les crustacées (la fermentation du poisson donne de l'ammoniaque, qui est au règne animal ce que l'alcool est au règne végétal) &c… L'incursion dans le règne animal pose des problèmes d'éthique personnelle et n'est pas aussi équilibrant et épanouissant que le règne végétal. Je ne conseille pas de l'aborder avant une sérieuse pratique de l'alchimie végétale. Dois-je préciser que je ne tue pas d'animaux dans mon travail alchimique ?
Enfin, le troisième règne traditionnel en alchimie, le règne minéral est le plus aride et le plus éloigné de notre appréhension de la vie. C'est celui où commence (je pense…) et où termine le cycle terrestre de la vie (là c'est mon expérience d'alchimiste qui me l'apprend). Règne aride et alchimie souvent sèche, art du creuset, de la fusion, qui utilise des matières souvent toxiques pour notre santé (antimoine, mercure…). Il existe toutefois des minéraux délaissés par les voies minérales classiques très utiles dans les opérations mixtes (qui utilisent plusieurs règnes) comme les silicates (l'argile par exemple). Cette partie de l'alchimie est souvent réputée être la plus profonde, pas toujours à juste titre à mon avis (pour exemple, je ne changerais pas une médecine universelle pour la santé contre une poudre capable de transmuter le plomb en or). Cette partie reste tout aussi passionnante que les précédentes et mérite sans aucun doute l'intérêt que la tradition lui porte.
Il existe d'autres voies alchimiques peu connues utilisant les champignons (et je ne pense pas aux psilocybes !) ou les levures, qui sont des êtres qui décomposent les autres matières, il y a des voies qui mélanges les règnes… il y a autant d'alchimies que d'alchimistes… La question est de savoir ce que l'on cherche.
Que cherche l'alchimiste ?
Je disais il y a un instant qu'il existait autant d'alchimies qu'il y a d'alchimistes, autant de buts donc… l'important reste de savoir ce que l'on cherche soi-même, et de s'assurer que l'alchimie est la bonne voie pour chacun.
Personnellement, j'ai un peu été pris en otage par l'alchimie, par passion, ce qui ne m'a pas aidé à trouver ma voie au départ. Un ami à moi a cherché dans l'alchimie un moyen de guérir un proche d'une maladie réputée incurable : il savait ce qu'il cherchait, il l'a trouvé (il a complètement réussi).
Le but avoué le plus commun est de découvrir l'esprit dans la matière pour se spiritualiser soi-même (initiation, développement personnel), un but très fréquent également est le rétablissement de la santé. Le but inavoué le plus commun reste de trouver un moyen de s'enrichir par la transmutation, ce qui est tout à fait illusoire vu l'énorme travail mis en œuvre et la difficulté que l'on doit avoir à écouler l'or produit (mais je parle au conditionnel : je n'ai moi-même jamais vu d'or alchimique).
Devant la difficulté de trouver une voie qui me corresponde, ce qui est nécessaire pour comprendre un minimum les principes et les procédés alchimiques, je me suis tourné vers la distillation des eaux-de-vie, qui est une activité des plus concrètes, et vers la spagyrie et les médecines naturelles que j'ai citées plus haut. Ces intérêts parallèles à l'art hermétique m'ont permis de mieux cibler mon objectif, et de mieux reprendre mes recherches alchimiques. Cet objectif, double, est d'une part trouver le "comment ça marche ?" (autrement dit : qu'est-ce que la vie ?) et ensuite, rétablir ou entretenir la santé pour moi et mes proches.
Les pages qui suivront dans cette catégorie développeront tous ces aspects, la pratique thérapeutique surtout, dans un but de partage des connaissances comme il est habituel sur ce site : profitez-en, et faites nous profiter de vos travaux si vous êtes sur le même mode d'échange de savoirs.
En Occident, l'un des plus grands alchimiste européen a aussi été l'un des plus grands médecins : Paracelse. Dans l'Orient médiéval, cela a aussi été le cas avec Avicenne. La recherche de la vie et celle de la santé ont souvent été de pair en alchimie.
Je dois préciser que je suis bouilleur ambulant et non médecin, et que je ne pratique pas la médecine. J'ai fait mienne la devise du Dr. Bach "Guéris toi toi-même", mais les méthodes proposées n'ont pas la prétention de se substituer à la consultation d'un médecin.
Personnellement, je considère qu'il est aussi fou de vouloir se passer aveuglément de la médecine que de de lui abandonner totalement la prise en charge de sa santé…
Les articles sur l'alchimie qui feront suite à cette introduction ne suivront pas nécessairement la voie alambiquée du serpentin qui forme le fil conducteur de ce blog et seront donc classés dans une catégorie à part.
Matthieu